Rentrée Blanquer (2) : 2S2C et "l’école des savoirs fondamentaux"
Avec le "protocole sanitaire", J.M. Blanquer annonçait 4 temps différents pour les élèves : en classe, en télé-enseignement à la maison, en étude, sur les activités 2S2C (Sport, Santé, Culture, Civisme). Le ministre instrumentalise la situation pour avancer vers "l’école des savoirs fondamentaux" : "lire, écrire, compter" incomberait aux professeurs, le sport et la culture seraient livrés aux collectivités territoriales.
"Sport, santé, culture, civisme" ?
Le dispositif 2S2C annoncé le 21 avril, figure dans la "circulaire du 4 mai relative à la réouverture des écoles et établissements" . L’accueil des élèves sur le temps scolaire peut être assuré localement par d’autres intervenants que leurs professeurs : "intervenants associatifs ou de statut privé non associatif (salarié, auto-entrepreneur, étudiants, etc.), des parents, des personnels municipaux (éducateurs sportifs, ATSEM, bibliothécaires, jardiniers, etc.), des bénévoles (parents d’élèves, retraités, étudiants)".
Si toutes les sorties scolaires sont annulées, les activités dans le cadre des 2S2C sont autorisées dès lors qu’elles sont assurées dans le strict respect de la doctrine sanitaire COVID-19.
Ces intervenants pourront encadrer des activités physiques et sportives, artistiques et culturelles, scientifiques , civiques et d’éducation à la citoyenneté, numériques, éco-citoyennes, de découverte de l’environnement.
Les activités physiques et sportives sont cadrées par une instruction adressée aux préfets "Les scolaires accueillis dans le cadre du programme sport santé civisme et culture" pourront accéder aux équipements sportifs avant le 2 juin (date de leur réouverture), mais pas les professeures d’EPS avec leurs élèves.
Ainsi, des animateurs recrutés par les collectivités prendront en charge, sur le temps scolaire, à la place des cours, des "petits groupes" d’élèves (15 au maximum) pour faire du sport, des activités artistiques ou culturelles. Quel bon moyen pour ne pas créer de postes, et même d’en supprimer [1] !
250 millions pour financer les 2S2C…
Une "Convention relative à la continuité scolaire et la réalisation d’activités sportives et culturelles sur le temps scolaire", sera signée entre le DASEN et la collectivité territoriale. L’État prend en charge le coût de la prestation organisée par la collectivité et sa responsabilité administrative se substitue à celle de la commune ou de son prestataire. Pour les 2S2C, Blanquer trouve de l’argent magique (250 millions d’euros), alors que les suppressions de postes continuent et pourraient être amplifiées.
Cheville ouvrière de la transformation de l’École, le dispositif 2S2C s’étend : pour Macron et Blanquer il préfigure "l’école de demain", avec des cours jusqu’à 14h.
Ce réaménagement du temps scolaire constitue une sérieuse menace pour les cours d’EPS, de musique, d’arts plastiques, de théâtre, voire d’autres enseignements obligatoires (jusqu’à leur suppression ?). La demande de Macron adressée aux intermittents du spectacle d’intervenir dans les écoles en contrepartie d’une prolongation de douze mois, (jusqu’à août 2021) de leurs droits l’assurance chômage va dans ce sens.
C’est tout un processus d’externalisation, voire de transformations de pans entiers d’enseignements en “activités“ déléguées à une kyrielle d’acteurs locaux (l’académie de Besançon en donne des possibilités exhaustives).
Les plans de réouverture des écoles le 11 mai sont négociés par les collectivités territoriales : les consignes différentes d’un département à l’autre, parfois d’une école à l’autre, participent avec la mise en place d’activités diverses, parallèlement à la diminution drastique des heures de cours, et à l’explosion du cadre national de l’Enseignement public et des inégalités.
…"l’école des savoirs fondamentaux"
Appuyé sur l’expérimentation imposée (travail en “distanciel”, en “présentiel” cadré par un “protocole sanitaire”) Blanquer entend imposer "l’école des savoirs fondamentaux" : "lire, écrire, compter et respecter autrui" . Qu’en est-il des notions d’histoire, de géographie, de sciences, des arts… de l’acquisition d’une culture large, de capacités de réflexion et de critique ?
Rappelons ces mots d’Adolphe Thiers (1849) : "Lire, écrire, compter, voilà ce qu’il faut apprendre ; quant au reste, cela est superflu […] je ne puis consentir à laisser mettre du feu sous une marmite sans eau". Et à l’époque, sous le ministre Falloux, seuls ces "fondamentaux" et l’enseignement religieux étaient obligatoires.
Déléguer le sport et la culture aux collectivités territoriales, n’est-ce pas là une façon “moderne“ de se débarrasser du "superflu" ? Il y a donc urgence à exiger clairement le retrait des 2S2C, et la création massive de poste d’enseignants.
- Lire tous les articles de la Lettre d’Émancipation (Lyon-69) de mai 2020 :
UNITÉ POUR S’OPPOSER À "L’ÉCOLE DE DEMAIN" DE MACRON - BLANQUER