Combattre la politique de Macron sur un terrain de classe, cesser le « dialogue social »

La CA académique du SNES de Lyon s’est tenue le 11 janvier 2024 en matinée (avant la publication de la composition du gouvernement Macron-Attal).

Intervention générale d’Émancipation

Attal vient d’être nommé, Premier ministre. Jupiter attend de lui qu’il mette en œuvre son projet de ’réarmement et de régénération’ (annoncé lors de ses vœux du le 31 décembre) : un ’réarmement industriel, économique, européen’ mais aussi ’civique’. Ce réarmement civique de la jeunesse est au cœur du vaste chantier de l’école qu’Attal a porté depuis l’été : de la mise en œuvre de la réforme/destruction de l’Enseignement professionnel (LP) au ’choc des savoirs’, ce qui induit une profonde mise en cause du droit aux études pour une grande partie de la jeunesse ; cela s’accompagne de la réforme des concours en lien avec la réforme Guerini de la Fonction publique pour imposer le salaire au mérite.

Il s’agit d’une offensive d’ampleur tournée contre les personnels, contre l’école, contre la jeunesse (avec la montée en puissance du SNU, avec l’uniforme, avec le formatage idéologique ouvertement programmé et assumé, avec une profonde mise en cause de la liberté pédagogique et aussi des libertés fondamentales.

Attal sera flanqué de Emmanuel Moulin, comme directeur de cabinet, un ancien conseiller de Sarkozy, appuyé par l’Élysée, (proche d’Alexis Kolher).

Et Eric Ciotti lui a fait part de ses vœux de réussite. Les L. R. soutiennent ses positions sur l’école et la jeunesse (le projet de Pécresse en Ile de France est en convergence avec celui de Macron, L. Vauquiez a proposé son aide à G. Attal… E. Ciotti a été le premier à s’engager dans l’expérimentation sur l’uniforme…).

Macron entend poursuivre la mise en œuvre de son programme de destruction des acquis arrachés de haute lutte : retraites, assurance chômage, sécu, droit aux études gratuites débouchant sur des diplômes nationaux reconnus dans les conventions et statuts nationaux. Dès 2017 il a affirmé vouloir en finir avec les statuts.

Après l’appel aux L. R. pour voter avec le RN, sa loi immigration, Macron poursuit sa recherche d’une majorité pour gouverner. G. Attal est l’instrument d’une tentative de recomposition de la majorité présidentielle sur sa droite. Il mènera sans complexes une politique encore plus à droite, une politique de guerre contre les travailleurs et la jeunesse.

Il veut créer un marché du travail où la concurrence entre les salariés règne en maitre, détruire toute solidarité de classe entre les travailleurs face au patronat, afin d’aboutir à une baisse drastique la valeur du travail, du niveau des salaires et des droits sociaux. C’est pour lui un moyen essentiel de son "réarmement économique et industriel" face à la concurrence mondiale’.

Macron utilise toutes les ficelles de la Ve République, ce régime foncièrement anti-démocratique. On l’a vu avec la loi sur les retraites. Et on vient de le voir plus encore avec la loi immigration. Il n’a pas hésité pour faire avaliser la loi qu’il a initiée et coachée jusqu’au bout à rameuter les L. R., ceux qui, comme Ciotti, chassent sur les terres du Rassemblement national. Puis dès l’adoption il a demandé au Conseil constitutionnel de faire un peu de ménage afin de pouvoir la promulguer au plus vite. Quel que soit le polissage, cette loi se fonde sur des principes inacceptables. Elle doit être abrogée.

L’objectif est d’introduire la division entre "eux" (les exilés, étrangers) et "nous" (les "nationaux" de souche) [1], pour entraver toute solidarité de classe entre travailleurs et travailleuses quelle que soient leurs origines. Le pouvoir veut détourner l’attention, afin de poursuivre les attaques contre tous les droits sociaux, tous les acquis ouvriers, restreindre plus encore les libertés fondamentales, les droits des associations, le droit syndical.

C’est donc une solidarité de classe qu’il faut organiser contre toute la politique de Macron. Mais qui peut croire que cette solidarité de classe puisse se construire avec des parlementaires macronnistes, tels Cécile Rihac, qui a fait voter une loi contre le statut des professeurs d’écoles, donnant aux directeurs d’école un pouvoir hiérarchique ?

Peut-on croire que l’on puisse combattre Macron et ses attaques en adressant des suppliques à Jupiter ou au Conseil constitutionnel ?

Pour le retrait de la loi immigration, ce dont nous avons besoin, c’est d’organiser une mobilisation unitaire, sur un terrain de classe, avec les premiers concernés, avec les collectifs de sans-papiers, les associations militantes indépendantes du gouvernement, du pouvoir.

Cette unité, il faut la construire avec les organisations et collectifs qui se situent en défense du monde du travail.

Motion Émancipation

En déclarant qu’il "emmène à Matignon la cause de l’école" G. Attal affirme clairement qu’il entend mettre en œuvre jusqu’au bout les contre-réformes engagées et celles annoncées récemment.

Avec le ’choc de savoirs’, les plans de Macron et d’Attal vont bien au-delà d’une simple réforme du collège. En lien avec la réforme de l’enseignement professionnel, c’est une transformation profonde de l’école qui est ainsi programmées, avec d’importantes conséquences pour la jeunesse et les personnels, de la maternelle au lycée.

Ces plans conduisent à la déscolarisation d’une part importante de la jeunesse envoyée très vite en entreprise avec un simple kit de compétences : le "nouveau socle" annoncé substitue de simples "repères" à une véritable culture ; les ’compétences psychosociales’ visent à soumettre la jeunesse aux besoins variables du patronat selon chaque bassin d’emploi. L’individualisation des parcours, prépare l’explosion de tout cadre national des programmes, des horaires, des diplômes.

Ce "Choc des savoirs" organise la diminution du nombre d’élèves en lycée (des suppressions de postes). Il est lié aux annonces de Macron de fermeture de formations universitaires et de financement de formations privées… (cf. la fermeture de classes prépa). Cela conduit à l’explosion du second degré avec l’école du socle (primaire-collège) et le bac -3/bac + 3 (lycée-1er cycle universitaire).

Ce "Choc des savoirs" nécessite aussi un autre métier : des enseignants polyvalents, transformés en simples exécutants. La réforme des concours va dans ce sens : c’est une attaque frontale contre les statuts. C’est aussi une attaque frontale contre notre syndicat.

Cette réforme des concours s’articule à la réforme de la Fonction publique que Guerini entend présenter en conseil de ministres en février. Sous couvert de rendre la Fonction publique (et le métier d’enseignant) "plus attractive et plus moderne", Guerini veut s’attaquer au statut de fonctionnaire, ’déverrouiller les freins l’embauche’ (comprendre ’casse des concours’), imposer le "salaire au mérite" ("évaluer et récompenser", selon les résultats).

On ne peut combattre aujourd’hui pour le droit aux études pour tous, pour un enseignement porteur d’une véritable culture contribuant à l’émancipation, pour la hausse salaires, du point d’indice, les créations des postes, la diminution des effectifs par classe… sans exiger le retrait du plan ’Choc des savoirs’ de Macron et Attal, le retrait du plan Guerini sur la Fonction publique.

Le dialogue social permanent avec le gouvernement, le ministère ne peut que conduire à la défaite. On vient de le voir une fois de plus, après plus d’un an de concertation, le 8 janvier, les textes de la réforme présentés par ATTAL au CSE ont recueilli zéro voix ’pour’. Ce qui n’empêche en rien leur publication. Et les concertations Accès-Parcours-Compétences dans la Fonction publique n’ont eu qu’un seul effet : permettre à Guerini de préparer sa loi contre le statut. Il faut donc définir clairement les revendications, exiger clairement le retrait des mesures Attal et Guerini, rompre le dialogue social avec le gouvernement et organiser la mobilisation avec l’objectif d’imposer une défaite à ce gouvernement.

1- La CA du SNES de Lyon se prononce pour le retrait du plan Macron-Attal (« choc des savoirs »), ce qui implique de quitter les discussions en cours sur ces mesures. Sur ces bases, il sera possible d’ouvrir la voie à la mobilisation unie pour le contraindre le gouvernement Macron-Attal à reculer.

2- La CA du SNES de Lyon se prononce pour le retrait du projet ministériel de réforme des concours de l’enseignement.

3- La CA du SNES de Lyon considère que la responsabilité du SNES et de la FSU est d’exiger le retrait du projet de loi fonction publique et de refuser toute discussion sur ces bases inacceptables.

La direction académique (Unité et Action) a intégré dans le texte de la CA les deux passages en rouge ; elle a refusé de se prononcer pour la rupture des concertations sur ces contre réformes (Attal et Guerini). L’École Émancipée n’a pas non plus voté pour cette motion.


International  : Soutien à la résistance populaire en Ukraine

Le 24 février, il y aura deux ans que Poutine a envahi l’Ukraine, deux ans qu’en Ukraine, la résistance populaire fait face à l’armée du dictateur Poutine. Cette invasion est une menace pour toute l’Europe.

Sous la loi martiale, les travailleurs ukrainiens et la jeunesse tentent aussi de s’organiser pour résister aux mesures et lois de leur gouvernement qui s’attaquent à leurs droits et garanties (droit des salariés, droit des étudiants…). Des salariés ne sont pas payés : ils ont fait grève en dépit de la loi martiale pour imposer le paiement des arriérés.

Le Collectif de soutien à la résistance en Ukraine de Lyon duquel la FSU est partie prenante veut organiser le 24 février, une initiative de rue (rassemblement…). Il va prendre contact avec des organisations ukrainiennes. Émancipation est intervenue pour que s’exprime à cette occasion un soutien d’organisations françaises à cette résistance populaire sur ces deux axes : soutien à la résistance contre l’offensive armée de l’impérialisme russe (au nom du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes) et soutien aux travailleurs, aux enseignants, aux étudiants qui luttent en défense de leurs droits contre les mesures de leur gouvernement.

La FSU (et d’autres syndicats) ont déjà noué des liens avec les syndicats ukrainiens, organisé des convois. Le 24 février doit s’exprimer un soutien de classe, distinct des politiciens marconistes ou LR qui prétendraient se faire valoir à l’occasion de cette date. Pour cela il est nécessaire que notre syndicat (la FSU) prenne toute sa place en participant notamment à la prochaine réunion du collectif.

Notes

[1L’historien Gérard Noiriel indique que c’est face à l’organisation des ouvriers, qui fin XIXe siècle, se forgent une "identité de classe" ("nous" ouvriers opposés à "eux’"patronat) que pour le pouvoir, "la politisation de l’identité nationale devient alors une arme essentielle pour combattre la lutte des classes". Dans une situation de crise économique (Grande dépression 1873-1896), "La politisation de l’identité nationale peut donc être vue comme la riposte que la droite a trouvé pour répondre à la politisation de la classe ouvrière"