UNITÉ POUR LE RETRAIT DES PROJETS MACRON-GUÉRINI-ATTAL CONTRE LE STATUT DE FONCTIONNAIRE
Le gouvernement Macron et son ministre S. Guerini ont confirmé leur objectif : une nouvelle réforme de la fonction publique, avec la présentation d’un projet de loi d’ici décembre. En ciblant les concours, les grilles de rémunération et les déroulements de carrière, le gouvernement entend remettre en cause des éléments essentiels du statut de fonctionnaire.
En parallèle, G. Attal a ouvert deux concertations : l’une sur le prétendu plan “de reconnaissance et d’attractivité du métier d’enseignant” et l’autre sur “élever le niveau sur les savoirs fondamentaux”. (Le Monde 13/09/23) Les contours de ces annonces sont en réalité étroitement liés au projet de loi fonction publique.
Une menace pour le statut de fonctionnaire
S. Guerini veut que son projet de réforme de la Fonction publique, du statut, soit discuté au Parlement début 2024. Et il a engagé des concertations APR (Accès, Parcours et Rémunérations) avec les syndicats.
Il s’agit de s’attaquer aux fondements des acquis statutaires, d’aller vers la fin de “l’emploi à vie” (Macron).
- l’accès : “professionnaliser les concours", les “recentrer sur les compétences ; recruter sur titre” avec entretien, doubler le nombre d’apprentis d’ici 2025”, et titulariser à la fin du contrat d’apprentissage …
- le parcours : en finir avec la fonction publique de carrière (individualiser, s’attaquer à l’ancienneté…), mettre en cause la qualification donnée par le concours au profit des compétences à valoriser… tout au long de la vie.
- la rémunération : “récompenser les compétences, le mérite, permettre davantage de mobilité”. Guerini parle de performance. Et au nom de la mobilité, en finir avec la fonction publique de carrière (la réussite au concours donne accès à un corps dans lequel le fonctionnaire progresse ; il est affecté à un poste et peut changer de poste sans subir de conséquences sur son déroulement de carrière). Il s’agit d’aller vers une fonction publique
d’emploi, le ministre indique ainsi en toute clarté : “Reconnaître et récompenser le mérite, quand je dis cela, j’ai le sentiment de beaucoup mieux parler aux jeunes actifs qui se posent la question de rejoindre la fonction publique que quand je leur parle de corps, de grille et de catégorie”. (Les Échos 28/09/23).
Le directeur de cabinet de S. Guerini, P. Peny, est co-auteur du rapport Simonpoli-Peny sur les grilles et les carrières publié en mars 2022. Ce rapport préconise une rémunération à deux composantes : une part indiciaire au minimum à laquelle s’intègrerait les prises de responsabilités (cf. l’ISOE…) et une part liée à la performance (au mérite) à la main des responsables locaux. Cette part variable prendrait progressivement une part accrue en lien avec l’essor d’une “culture de l’évaluation” et excluait tout forme d’avancement automatique à l’ancienneté.
Dans le même temps, Macron décide que l’école devient un sujet régalien et charge le ministre Attal d’avancer vers la « révolution culturelle » qu’il a annoncée à Marseille.
Poursuite des objectifs d’autonomie et de contractualisation dans l’éducation
C’est 2500 postes qui sont encore supprimés au budget 2024. Pas question de diminuer le nombre d’élèves par classe. Pour vaincre la résistance des enseignants, le pacte est un premier outil ; mais il faut aller beaucoup plus loin. En connexion avec le projet de loi de S. Guerini, un soi-disant “grand plan d’attractivité”, présenté par G.Attal en décembre, passerait par la “fin du concept de recrutement par concours pour un emploi à vie. Ou (le fait) de permettre aux enseignants de n’exercer leur fonction que pour une durée limitée en leur garantissant des formations pour changer de carrière s’ils le souhaitent.” (Le Figaro 8/07/23).
L’obligation de formation sur son temps personnel prépare la nécessité d’acquérir et de valoriser ses compétences tout au long de son “parcours professionnel". Attal parle "d’accompagnement” de ceux qui ne veulent pas faire toute leur carrière dans l’EN. L’évaluation des performances permettra surtout de pousser vers la sortie...
Sous couvert d’une “mission sur élévation du niveau”, le gouvernement confirme ses objectifs d’autonomie et de contractualisation des établissements. Le ministre indique vouloir parvenir à un “collège plus modulaire”, conditionner le passage en 6e à des stages de réussite pendant les vacances, créer des classes de niveau, et “donner plus de marges de manœuvres à tous les niveaux pour adapter : dans les rectorats, pour piloter les moyens académiques selon les réalités, dans les établissements pour identifier les élèves qui nécessitent un accompagnement renforcé”. (Le Monde 6/60/23)
Le ministre évoque la poursuite des attaques contre les concours (une formation réduite à des compétences).
Au-delà, toute une série d’appels poussent à “réformer”. “L’éducation Nationale est un naufrage. Il va falloir se montrer radical. Il faut tout désétatiser”, dit un ministre (Le Figaro (8/07/23). V. Pécresse a fait adopter une “délibération pour un choc de décentralisation en Île-de-France”. Elle demande une autonomie totale des établissements (primaires et secondaires) dans l’organisation des enseignements : les enseignants recrutés par les chefs d’établissements deviendraient personnels régionaux, les LP sortiraient de l’EN…
Il s’agit, dit-elle, “d’une main tendue au gouvernement”, lequel a un an pour y répondre. Aurélie Taquillain, présidente du groupe régional de la Majorité présidentielle lui répond : “Nous sommes pleinement favorables à un examen au cas par cas des propositions de décentralisation qui pourront être faite”. (Café pédagogique 25/09/23)
Un rapport de la Cour des comptes s’intitule “Privilégier l’approche territoriale et l’autonomie dans la gestion des dépenses d’éducation”. Quant à la proposition de loi Brisson (LR) adoptée, en avril, en première lecture au Sénat, elle prévoit des établissements publics autonomes sur le modèle des charters schools avec des enseignants sous contrat local.
Le patronat l’exige : de la maternelle à l’université, l’Enseignement public doit se soumettre étroitement aux besoins immédiats du secteur privé. Il faut pousser les jeunes vers des formations professionnalisantes (déjà un grand nombre de bacheliers n’ont aucune proposition d’admission sur Parcoursup ; des centaines d’élèves de 3e n’ont pas de place en lycée professionnel). En ligne de mire : la déscolarisation d’une importante partie de la jeunesse. Le droit à l’enseignement est ouvertement mis en cause.
Pacte, réforme des LP ne sont que des jalons vers la fin de tout cadre national de l’enseignement, des diplômes, du statut. La marche à la privatisation de l’école est engagée. Macron et les LR convergent pour introduire une gestion privée de l’enseignement, avec un métier d’enseignant totalement redéfini (un job temporaire, rémunéré à la tâche…).
Les concertations avec Attal et Guerrini n’ont qu’un seul but : préparer le terrain pour ces réformes en désarmant les résistances et mobilisations.
Arrêt des concertations, unité pour le retrait des projets du gouvernement
C’est une évidence, en cette rentrée, les personnels sont confrontés à une offensive tout terrain du gouvernement.
Pour avancer vers ces objectifs, plus que jamais le gouvernement compte s’appuyer sur les concertations avec les directions des organisations syndicales pour désarmer et minimiser les mobilisations qui sont inévitables.
Face à la menace, la responsabilité première des syndicats est d’exprimer en toute clarté leur opposition aux projets Macron-Guérini-Attal, d’exiger le retrait de ces plans, ce qui implique de refuser de participer aux concertations. Une telle position ouvrirait la voie à la mobilisation unie pour repousser ces projets.
Projet d’accord sur la prévoyance
Dans la continuité de l’accord signé unanimement par les syndicats sur la complémentaire santé, le gouvernement veut un nouvel accord sur la prévoyance. Sous couvert d’une participation minime de l’employeur au financement, il s’agit d’une importante atteinte aux garanties statutaires :
- En excluant les fonctionnaires retraités du protocole, on détruit le système de solidarité fondateur de la Sécurité sociale et du système mutualiste. Et on ouvre un boulevard pour en finir avec le code des pensions, élément essentiel du statut de fonctionnaire d’État (en recrutant un fonctionnaire, l’État s’engage à lui verser un traitement, puis une pension jusqu’à sa mort).
- Dans le même temps, de nouveaux coups sont portés contre le budget de la Sécurité sociale (1). La diminution de la prise en charge de soins va conduire à augmenter la part de la complémentaire et donc du coût de l’assurance, ouvrant la voie aux assurances privées, au développement de sur-complémentaires pour ceux qui pourront se les payer.
Signer l’accord proposé par le gouvernement sur la prévoyance, c’est apporter un soutien politique au gouvernement et à Guerini qui s’apprêtent à faire avaliser une nouvelle loi contre les garanties statutaires et les salaires.
(1) Si le projet de budget de la Sécurité sociale 2024 (PLFSS) prévoit une hausse supérieure à l’inflation, il prévoit aussi 3,5 milliards d’économies. Le gouvernement envisage notamment de doubler les franchises médicales. Les fédérations hospitalières réclament "1,5 milliard d’euros pour compenser les effets de l’inflation". Elles considèrent que ce texte "acte de fait un plan d’économies majeures".
L’accord sur la "protection santé complémentaire" et le projet d’accord sur la prévoyance permettent un système de vases communicants : au plus la prise en charge de Sécu sera réduite, au plus la part complémentaire s’accroitra et avec elle le coût que les assurés devront payer pour se protéger (augmentation des cotisations de la complémentaire santé obligatoire , coût très important d’une 2e cotisation pour la prévoyance , voire une 3e cotisation pour une sur complémentaire pour celles et ceux qui pourront se la payer).