Des chars, des menaces, des solidarités
Interview de Bernard Dréano, membre du CEDETIM (Centre d’études et d’initiatives de solidarité internationale) et l’un des fondateurs de l’Assemblée européenne des citoyens (AEC/Hca-France), qui coopère avec des associations ukrainiennes depuis de nombreuses années. Ces deux organisations sont membres du Réseau européen de solidarité avec l’Ukraine fondé en mars 2022. Bernard vient de publier Jours gris et nuages d’acier sur l’Ukraine aux éditions Syllepse.
L’Émancipation : Plusieurs pays occidentaux viennent de décider de livrer des chars lourds à l’Ukraine. Cela signifie-t-il un tournant stratégique ?
Bernard Dréano : Rappelons d’abord qu’il y avait un état de guerre en Ukraine, au Donbass depuis 2014. L’agression russe de février 2022 avait explicitement pour but la destruction politique de la République d’Ukraine et l’occupation militaire de tout ou de la majorité de son territoire. La résistance ukrainienne, militaire ET civile a empêché la réalisation de ce scénario que pourtant les états-majors occidentaux considéraient comme probable.
Dès lors les gouvernements des principales puissances européennes et nord-américaines, ont décidé d’aider militairement l’Ukraine, tout en fixant dès le début des limites : de l’aide en matière de renseignement et de cyberguerre, mais pas de fourniture de matériel aérien permettant de sécuriser le ciel, la fourniture qualitativement limitée de matériel de combat avec notamment des armes antichars et canons modernes et des systèmes de défense anti-aériens de proximité mais pas des “boucliers” antimissiles, pas de missiles de plus de 80 km de portée (pour ne pas frapper les bases de départ de missiles, drones ou bombardiers sur le territoire russe), peu de drones “lourds”, pas d’hélicoptère de combat, pas de chars de bataille.
Les Ukrainien·nes, faisant bon usage des armes, ont brisé l’offensive russe vers Kyiv (printemps 2022) puis réussi les contre-attaques victorieuses dans la région de Karkhiv et de Kherson (fin d’été 2022). Mais les forces russes ont modifié leur approche : elles ont réussi leur retrait en bon ordre de Kherson, sont passées d’une guerre de mouvement à une guerre de tranchées, avec bombardements systématiques massifs des zones proches des fronts et progression éventuelle très lente. Quelque chose du genre 14-18, déjà expérimenté en début de guerre à Marioupol, qui implique la destruction totale des zones que l’on est censé “libérer” et entraine des pertes humaines considérables dans les troupes russes (en particulier des soldats du Groupe Wagner). Mais cela provoque aussi des pertes significatives côté ukrainien, ce qui fait partie de la logique de guerre d’usure (pour faire chic on parle sur les plateaux télé de “guerre d’attrition”) visant à “saigner” l’armée ukrainienne (comme disait le Kronprinz allemand en 1916 lors de l’offensive allemande de Verdun), tout en affectant l’arrière par les bombardements systématiques des infrastructures énergétiques dans toute l’Ukraine et les bombardements erratiques de zones civiles destinés à terroriser et démoraliser les populations. L’idée de Poutine est qu’avec le temps l’importance numérique de ses troupes, renforcée par les vagues de mobilisation et les ressources des arsenaux permettront de venir à bout de cette irritante résistance ukrainienne, et, si la guerre d’usure porte ses fruits, une éventuelle offensive de grande échelle.
Dans ce contexte, les limitations en matière de fournitures d’armes implicitement posées par les États-Uniens et les autres occidentaux, vont sauter les unes après les autres. Il s’agit d’abord d’un geste politique, sans conséquence militaire à court terme…
L’Émancipation : Pourquoi sans conséquences militaires à court terme ? Plusieurs de ces armes peuvent être livrées assez vite, notamment parce qu’elles sont déjà dans les pays voisins de l’Ukraine. Elles peuvent s’avérer rapidement décisives sur le terrain. Et par voie de conséquence conduire Poutine à monter d’un cran dans la menace d’un affrontement généralisé potentiellement nucléaire ?
B. D. : Les Américains viennent d’autoriser le principe du déploiement d’une batterie de leur système antimissile MiM-104 Patriot pour protéger Kyiv. Une telle batterie, outre qu’elle coûte un petit milliard de dollars, est très compliquée à mettre en œuvre, son déploiement fonctionnel va prendre des mois, mais peu importe à ce stade c’est l’annonce qui compte. Les Russes ont immédiatement fait une contre-annonce en disant qu’elle serait la cible potentielle de leurs missiles hypersoniques Kinjal (plusieurs millions de dollars pièces) ou Avangard (pas encore vraiment au point). Les chars de bataille c’est plus concret, mais par exemple les chars américains Abrams, dont la Maison Blanche annonce une “prochaine” livraison d’une trentaine d’unités à l’Ukraine, posent de nombreux problèmes avec leur turbine qui consomme beaucoup plus de carburant (et pas le même) que les autres chars, imposant toute une infrastructure de ravitaillement qui n’existe pas. Les Ukrainiens veulent des Leopard 2 allemands plus classiques et disponibles (en stock en Finlande ou Pologne), mais il faudra quelques mois avant qu’on en voie sur le terrain. Quand à nos Leclerc, on pourrait en déplacer quelques-uns des 18 qui sont en Roumanie… mais l’essentiel du stock (75 %) est aux Émirats arabes unis et en Jordanie… Demain nous aurons le même débat sur les avions, plusieurs États européens étant prêts à laisser leurs vieux F16 américains aux Ukrainiens en attendant leurs nouveaux F35… Bref tout cela ne va pas changer grand-chose du strict point de vue militaire, du moins à échéance des prochains mois, mais nourrir le feuilleton de “l’engrenage” et bien sûr profiter aux marchands d’armes…
Quant à la généralisation du conflit, depuis le début de la guerre, divers responsables russes et Poutine lui-même, agitent le spectre de la “riposte nucléaire”. Rappelons tout d’abord que lors des guerres de haute intensité du XXe siècle, mettant aux prises plus ou moins directement occidentaux et soviétiques (Indochine, Viêt-Nam, Corée, Proche-Orient…), le recours au nucléaire a été exclu (même si parfois la rhétorique a été utilisée…). Actuellement il s’agit toujours de rhétorique (évidemment nul ne peut prédire l’avenir à long terme) qui a un but précis : influer sur l’opinion publique, surtout ouest-européenne, pour faire cesser les livraisons d’armes à l’Ukraine et justifier la demande de “cessez le feu et ouverture de négociation”, aux conditions russes.
L’Émancipation : Mais la guerre fait de plus en plus de victimes, et est partie pour durer ; et même sans parler d’engrenage, des négociations ne sont-elles pas au plus vite nécessaires ?
B. D. : Logiquement, en cas de guerre d’agression, qu’il s’agisse des Israéliens ou des Russes, on demande d’abord à l’agresseur de cesser le feu… Enfin on devrait… Contrairement à ce que l’on entend ici ou là, les guerres ne se terminent pas toujours par des négociations. Les “traités (dit) de paix”, contrairement aux siècles précédents ne concluent plus les guerres et l’ouverture de “processus de paix” ne débouche guère sur des paix durables. Aujourd’hui toute négociation concerne d’abord les Ukrainiens et les Russes, si possible le cadre de l’ONU, avant l’OTAN, les États-Unis ou que sait-je. Les “accords de Minsk II” de 2015 ouvraient un “processus” pour régler la guerre au Donbass, Zelinsky avait été élu par les trois quarts des Ukrainien·nes en 2019 pour avancer en ce sens. En “reconnaissant” les Républiques séparatistes la veille de son agression de 2022, Poutine les a définitivement enterrés. Les appels à la négociation du début de cette guerre (y compris par Zelinsky lui-même), ont été enterrés explicitement par Poutine avec sa déclaration d’annexion par la Russie des districts du Sud-est ukrainien et implicitement pas les massacres de civil·es et les déportations de populations. Bien sûr il existe des canaux de contacts, pour les échanges de prisonniers, les exportations de céréales, mais malheureusement, pas à court terme de fenêtre d’opportunité de vraies négociations et donc d’un vrai cessez-le-feu. Poutine n’est même pas sur la ligne qui fut celle des dirigeants israéliens il y a trente ans face aux Palestiniens : “tout ce qui est à nous est à nous, tout ce qui est à vous est négociable”, mais encore sur le projet de démantèlement du pays voisin et de potentielle nouvelle offensive.
L’Émancipation : Nous n’allons hélas pas être débarrassé·es de cette horrible guerre par des pensées magiques ou des slogans creux. La guerre peut durer longtemps et un “après-guerre” éventuel sans paix juste et durable aurait des conséquences dramatiques pendant des années.
B. D. : Mais avant de revenir sur les conséquences actuelles de la guerre je voudrais parler de ce que nous, militant·e divers se réclamant de la justice sociale et de la paix au sens de la sécurité humaine, de la solidarité internationaliste et du droit des peuples, pouvons faire…
D’abord soutenir les forces anti-guerre très diverses en Russie. À bien des égards la clé de cette guerre est en Russie. L’opposition publique à la guerre s’est manifestée principalement du côté d’une opposition libérale-démocrate aujourd’hui férocement réprimée, dans des milieux intellectuels et des classes moyennes des grandes villes mais une autre partie de ces mêmes classes moyennes est nationaliste et farouchement pro-guerre. On estime à un million de personnes les Russes qui ont quitté leur pays, partant notamment dans le Sud-Caucase, en Turquie, en Serbie, en Asie Centrale. Principalement des gens des classes moyennes et d’une partie de l’élite intellectuelle et technique.
La Russie “périphérique” et populaire est largement coupée de ces milieux et dans ces cités de banlieue, les villes moyenne, les campagnes, les attitudes vis-à-vis de la guerre sont, majoritairement, “d’évitement” (le principe du vniye dit-on en russe) du moins dans la mesure du possible car la pression des autorités se renforce. C’est cette Russie “périphérique”, principalement affectée par la mobilisation partielle de cet automne qui a provoqué de nombreux incidents et révoltes. Ce qui ne fait pas un mouvement anti-guerre, souvenons-nous que la “mobilisation partielle” déclenchée par le gouvernement français de gauche en 1956 lors de “l’opération spéciale” en Algérie (le mot “guerre” était aussi interdit) avait provoqué incidents et révolte mais qu’un vrai mouvement anti-guerre n’a commencé à exister que trois années plus tard… La prochaine vague de mobilisation qui va venir sera mieux organisée. Mais l’augmentation exponentielle du nombre de morts et le coût de la guerre vont à la longue provoquer des réactions.
Le soutien aux antiguerres russes reste malheureusement insuffisant. Les dissident·es, réfractaires ou opposant·es ne bénéficient pas en France et en Europe de conditions d’accueil sérieuses. On parle à juste titre des organisations de défense des droits humains, dont l’emblématique Mémorial mais il y en a d’autres… On parle un peu des libéraux-démocrates et d’Alexis Navan, le pionnier le plus célébré du pays, aujourd’hui en danger de mort. D’autres mouvements restent ignorés à commencer par ceux qui chez nous devraient naturellement les aider. En Russie la guerre a créé de nouveaux clivages, et les plus résolus des “anti-guerres de gauche” cherchent à se regrouper, par exemple dans le Mouvement socialiste russe RSD . Il existe aussi des réseaux actifs se réclamant de l’anarchisme, et surtout les syndicalistes de la KPR, la deuxième confédération syndicale du pays, aujourd’hui réprimée, la FNPR, la confédération post-soviétique, a plutôt la configuration d’un “syndicat vertical fasciste”, farouchement pro-guerre. Contrairement à ce qui se passait il y a trente ans, les divers groupes de Mère de soldats, ne jouent pas (pas encore ?) un rôle important, le réseau Résistance féministe antiguerre (FAS) essentiellement composé de jeunes, est le mouvement le plus efficace du pays. Il joue aussi un rôle essentiel aujourd’hui en matière d’information sur ce qui se passe dans toute la Fédération de Russie, y compris à propos des résistances à la militarisation dans certaines républiques autonomes (Yakoutie, Bouriatie, Daghestan, Bashkiristan, etc.).
L’Émancipation : Que peut-on faire de plus en termes d’accueil et d’aide à l’organisation des opposant.es russes ?
B. D. : Il faut les rencontrer dans toutes leurs diversités, communiquer avec elle et eux, les aider à trouver des moyens financiers et sécuriser les séjours pour les exilé·es, faire connaître leurs positions et débats… par exemple une semaine de soutien aux prisonniers politiques en Russie fin février, n’a pas été très relayée en France (un concert à Paris et une petite manif) mais peu de circulation de l’information…
L’Émancipation : Peux-tu préciser quelles sont les forces qui peuvent être considérées comme progressistes en Ukraine ?
B. D. : Les mouvements progressistes en Ukraine aujourd’hui ne bénéficient pas non plus du soutien des mouvements homologues français ou européens. Pourtant, contrairement à la Russie, les contacts sont faciles, l’information disponible, les demandes politiques et matérielles, concrètes.
Les membres de ces mouvements, participent dans leur grande majorité à la défense beaucoup sont au front, chacun·e à sa manière contribue à la défense, civile de la société. Ils/elles s’opposent cependant aux offensives politiques néolibérales, pour faire passer des lois démantelant le code du travail et les droits sociaux “au nom des nécessités de la guerre” ou pour plaire au FMI, Iels se mobilisent contre la corruption, pour résister aux tendances nationalistes et virilistes, etc.,
C’est le cas d’une partie du mouvement syndical : un peu du côté de la FPU, Fédération des syndicats d’Ukraine, héritière de l’ancien syndicat unique et surtout de la KVPU, Confédération des syndicats libres d’Ukraine, implantée en particulier dans de grandes entreprises (chemins de fer, transports urbains, métallurgie, mines, énergie – dont nucléaire…). Une partie des militant·es, et parfois des dirigeant·es, de certains de ces syndicats se réclament de l’anarcho-syndicalisme. Il y a des progressistes dans les syndicats enseignants et un mouvement étudiant militant Pryama Diya (Action Directe). La loi martiale, du fait de la guerre, interdit manifestations et grèves. Les syndicalistes FPU, KVPU, étudiant·es, acceptent globalement cette situation, ce qui n’a pas empêché ces syndicats de mener certaines luttes parfois victorieuses.
C’est largement le cas d’un tissu d’associations, notamment de défense des droits. Par exemple pour l’accueil et la défense des droits des populations déplacées, avec l’association Vostok SOS . Le Centre des Libertés Civiques (co-prix Nobel de la paix 2022) est un autre exemple très connu. Localement existent des associations et réseaux antiracistes, antifascistes, pour les droits LGBT+, pour les minorités nationales et des groupes féministes actifs comme par exemple le groupe Bilkis qui vient de créer son “espace anticapitaliste” à Lviv, ce qui exaspère l’extrême droite. Des plateformes comme par exemple localement la Kherson Public Platform, ou le Center for United Action , qui, avec ou sans le soutien des autorités locales, s’efforcent de faire en sorte que l’aide humanitaire soit dirigée vers les besoins effectifs, et ne soit pas confisquée par les corrompus locaux ou gaspillée par le “Charity Business” d’ONG ou structures extérieures. On peut aussi citer les écologistes du réseau Ecoacti dont la coopérative Longo Maï est active en Ukraine depuis plus de trente ans.
Et puis des groupes et mouvements politiques se réclamant du socialisme, les réseaux anarchistes ou anarcho-communistes comme l’Union autonome des travailleurs, et surtout le petit mais très actif Mouvement Social ( Sotsialnyi Rukh ), et la revue Commons .
Or, dans leur majorité, les gauches radicales, les libertaires, les écologistes les féministes, les associatifs altermondialistes ou humanistes, les mouvements non-violents, les organisations étudiantes, beaucoup trop de syndicats en Europe oublient leurs camarades ukrainien·nes et russes, même si en France certain·es se mobilisent dans la CGT, la FSU ou Solidaires, avec notre Réseau européen RESU (Réseau européen de Solidarité avec le Peuple ukrainien).
L’Émancipation : Tu as parlé des conséquences, dès maintenant, et dans l’avenir de cette guerre, tu peux nous en dire plus ?
B. D. : J’ai insisté sur le fait que “la menace de l’engrenage” était instrumentalisée par la propagande poutinienne pour empêcher l’armement de l’Ukraine et faire croire en la capacité de “négociation” des Russes. Cela ne signifie pas qu’il n’y ait aucun risque réel d’engrenage. Face aux crises multiples, dont la guerre n’est qu’un aspect (actuelle en Ukraine, potentielles guerres en Asie, etc.) et dont le plus menaçant est la catastrophe climatique et de la biodiversité, les politiques diverses sont à la “sécuritisation” c’est-à-dire à l’idée que pour tous les problèmes, la réponse principale, sinon la seule, est sécuritaire. La militarisation est un aspect de cette situation, avec l’augmentation importante des budgets militaires des grandes et moyennes puissances, et le poids des complexes militaro-industriels et financiers. La guerre en Ukraine sert d’alibi pour des choix sécuritaires politiques, financiers et industriels qui vont nous occuper pendant des années. Or les gauches en général y répondent par des slogans et des vœux pieux, voire des croyances (comme pour certain·es la pertinence de la dissuasion nucléaire), sans débats, sans propositions. Par exemple qu’allons-nous répondre, tout de suite, à la loi de programmation militaire française qui vient en débat, qu’avons-nous dit vis-à-vis de la faillite totale de l’OTAN en Afghanistan ? Ou de celle de la réponse militaro-sécuritaire au Sahel ?
La guerre en Ukraine aggrave les cassures et les divisions, entre (très schématiquement) “l’Occident” et le “Sud Global”. Précisons, il est naturel que beaucoup de gouvernements du monde ne se sentent pas directement concernés par la politique de soutien occidental à l’Ukraine et à la guerre régionale qui s’y déroule. Naturel aussi que ces gouvernements cherchent à diversifier leurs relations et à ne pas être prisonniers de sphère d’influence. Il est compréhensible que beaucoup de peuples du monde soient dubitatifs quand les mêmes Occidentaux expliquent qu’il s’agit d’une lutte pour les “valeurs démocratiques et autres” quand ils voient l’ampleur du “deux poids, deux mesures” en matière de solidarité (comme on le voit au Proche-Orient par exemple) et la réalité des politiques de ces mêmes Occidentaux dans nombre de pays du Sud sur le plan économique, social, sécuritaire, etc. Il est toutefois très inquiétant de voir une partie de la jeunesse africaine s’imaginer que la Russie est un allié alternatif et que les gangsters prédateurs du groupe Wagner vont “régler le problème” des djihadistes, mais inquiétant aussi de voir qu’une grande partie des forces de gauche des Amériques (Nord et Sud), du monde arabe, et aussi d’Asie et d’Europe, souscrit au narratif poutinien et adopte des positions “campistes” qui aboutissent concrètement à la paralysie… Ceci concerne aussi largement les organisations françaises, je parle aussi bien de certains courants politiques et syndicaux que des ONG et associations progressistes fonctionnant avec des partenaires internationaux…
L’Émancipation : Au niveau européen qu’en est-il des différences d’investissement des différents pays dans le RESU et quelles sont les complémentarités entre les réseaux de soutien nationaux et le RESU, notamment en France ?
B. D. : Le RESU est comme son nom l’indique d’abord européen, et constitué de militant·es divers (mais assez peu d’artistes ou d’universitaires), actif·ves sur divers terrains, politiques, associatifs, syndicalistes, de diverses nuances éco-socialistes et vertes, marxistes et libertaires, défenseur·euses des droits humains et altermondialistes. Il est né en Pologne, en Suisse, en France, en Belgique et s’est développé en Irlande, au Royaume-Uni, au Danemark, moins en Espagne, Allemagne ou Italie, mais depuis peu actif en Amérique du Nord ou en Australie. Des syndicalistes (français·es, britanniques, polonais·es, catalan·es…) ont formé un groupe de travail spécifique, de même que des féministes (avec des Polonaises, des Françaises, des Britanniques…) toujours en relations avec les Ukrainien·nes et autant que possible avec des Russes. Des Polonais, Slovaques et Suisses jouent un rôle significatif dans l’animation du Réseau et la diffusion des infos en plusieurs langues.
Interview réalisée par Olivier Vinay, le 5/02/2023
Paru dans la revue L’Émancipation syndicale et pédagogique , n° 8 , avril 2023